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Langage clair et écriture inclusive : un mariage possible?

De plus en plus de polémiques voient le jour au sujet de l’écriture inclusive. En France, le ministre de l’éducation a interdit son utilisation dans les écoles. Il estime, notamment, que l’utilisation du point médian est « nuisible à la pratique et à l’intelligibilité de la langue française ».


Au Nouveau-Brunswick, l’écriture inclusive fait aussi jaser. Ainsi, en juin dernier, dans un article portant sur la soirée des Éloizes, Radio-Canada a utilisé un pronom masculin pour parler de l’artiste queer Xavier Gould. Alors que ce dernier avait manifesté, lors d’une entrevue réalisée quelques mois plus tôt, son désir d’une langue plus neutre et plus inclusive, prônant notamment l’utilisation des pronoms non-binaires (comme « iel », « ol », etc.). L’article en question a été modifié par la suite, « pour respecter l'identité de genre de Xavier Gould », en utilisant des phrases neutres et non-genrées. Dans la foulée, Radio-Canada annonçait qu’un comité formé de membres des groupes d’équité, de linguistes et d’autres intervenants réfléchissait à l’écriture inclusive et à l’emploi de pronoms neutres sur ses différentes plateformes.


Il s’agit de deux exemples parmi tant d’autres, et les « pour » et « contre » l’écriture inclusive n’ont pas fini d’alimenter les discussions. Mais, au-delà des polémiques, est-il possible d’écrire un texte inclusif en langage clair?

Avant de répondre à cette question, il faut d’abord définir ce que recouvre l’écriture inclusive. Ensuite, nous verrons si cela est compatible avec les règles du langage clair.


L’écriture inclusive, c’est quoi?

De manière générale, on peut dire que l’écriture inclusive est une façon d’écrire qui permet de donner la même visibilité aux hommes et aux femmes, et donc de ne pas discriminer les personnes en fonction de leur genre.


En effet, si l’on utilise le masculin générique, notre cerveau associe généralement cela à des hommes. Certaines études ont ainsi démontré que lorsque l’emploi du masculin est utilisé dans une offre d’emploi (par exemple « agent de projet », « infirmier », « professeur », etc.), les femmes ont tendance à ne pas envoyer leur candidature. D’autres études ont démontré que les candidatures des femmes étaient perçues comme moins compétentes par l’équipe des ressources humaines lorsque l’offre d’emploi est exclusivement rédigée au masculin.


Recourir à l’écriture inclusive permet donc de donner davantage de visibilité aux femmes et d’avoir un impact concret dans la vie de tous les jours.


Quelles sont les formes d’écriture inclusive?


On résume souvent l’écriture inclusive aux doublets-abrégés. Ceux-ci peuvent prendre différentes formes, comme :

  • Le point : les étudiant.e.s

  • Le point-médian : les étudiant⸱e⸱s

  • Les parenthèses : les étudiant(e)s

  • La barre oblique : les étudiant/e/s

  • La majuscule : les étudiantEs

Ce sont essentiellement ces doublets-abrégés qui génèrent de nombreuses critiques dans le chef des opposants à l’écriture inclusive (« C’est trop compliqué! », « Et les dyslexiques? », « Comment on fait à l’oral? », etc.).

Si l’on se réfère à l’Académie française ou à l’Office québécois de la langue française, ces doublets-abrégés sont à éviter.


Mais il est possible d’écrire de façon inclusive de bien d’autres manières.


Tout d’abord, vous pouvez utiliser les doublets complets. Cela consiste à utiliser le terme masculin et féminin en entier (exemple : les étudiants et étudiantes, les infirmières et infirmiers, etc.). Dans ce cas, vous pouvez, au choix, utiliser en premier le masculin ou le féminin. Nous vous conseillons alors d’utiliser la règle de l’accord de proximité, qui consiste à accorder en genre et en nombre les verbes, adjectifs, etc. selon la forme masculine ou féminine la plus proche (exemple : les étudiants et étudiantes sont douées ou les étudiantes et étudiants sont doués).


Certaines personnes considèrent cependant que les doublets ne sont pas inclusifs dans la mesure où ils n’incluent pas les personnes non-binaires.


Ensuite, vous pouvez aussi écrire de façon inclusive en utilisant la forme neutre ou épicène. Cela consiste à utiliser des noms, adverbes, adjectifs qui comprennent l’ensemble des personnes, quel que soit leur genre. Ainsi, plutôt que d’écrire « les clients et clientes », vous pouvez utiliser « la clientèle » ou « nos équipes » plutôt que « nos collaborateurs et collaboratrices ». Pour y arriver, il est parfois plus facile d’avoir recours à la forme passive. Par exemple, plutôt que d’écrire « Les étudiants et étudiantes doivent rentrer leur dossier pour ce vendredi », écrivez « Ce dossier doit être rentré pour ce vendredi ».

Si vous bloquez sur un mot, vous trouverez une série de termes épicènes sur la page http://bdl.oqlf.gouv.qc.ca/BDL/gabarit_bdl.asp?id=5465.


Enfin, vous pouvez féminiser les titres et fonctions. Écrivez « Madame la Directrice » plutôt que « Madame le Directeur » par exemple.


Un texte peut-il être clair et inclusif?


Il est important de rappeler que si l’on veut écrire un texte en langage clair, il importe de se demander à qui l’on s’adresse. Qui va lire mon texte? Si votre public cible est habitué à lire des textes rédigés uniquement avec des doublets-abrégés, pourquoi ne pas les utiliser.


Mais tout le monde n’a pas l’habitude de lire des textes écrits en utilisant les doublets-abrégés. Cela peut rendre leur lecture très compliquée pour de nombreuses personnes, et notamment pour les personnes moins alphabétisées.


Par conséquent, si votre public cible est composé de personnes aux niveaux de littératie différents, nous vous conseillons de rédiger votre texte en utilisant les doublets complets et/ou l’écriture épicène. Cette façon de faire vous permettra certainement de rejoindre un maximum de monde et vous permettra d’être clair et inclusif!


Enfin, nous vous déconseillons d’utiliser les nouvelles formes linguistiques non-binaires, telles que « iels », « celleux », « toustes », « éducateurice », « Les jumelleaux étaient toustes belleaux », etc. Cette nouvelle forme d’écriture nous paraît encore trop peu connue du grand public et a donc tendance à davantage exclure les gens qui ne se sentent pas concernés, faute de comprendre ce qui est écrit.


Nous espérons que ces quelques conseils vous permettront à la fois d’écrire de façon inclusive mais aussi de vous assurer de respecter certains conseils d’écriture en langage clair!

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